Il est connu de tous qu'au Togo, l'impunité est devenue le quotidien des populations, avec des crimes et assassinats dont les auteurs courent tranquillement les rues. La situation exaspère des organisations de la société civile qui montent au créneau.
Déclaration liminaire
Autorités administratives, politiques, religieuses et judiciaires, Responsables de tous les partis politiques, Responsables des organisations de la société civile togolaise, Citoyennes et citoyens togolais,
« La personne humaine est sacrée et inviolable » article 21 de la Constitution Togolaise
Depuis des années, les organisations de défense des droits de l'homme demandent aux autorités togolaises de mettre fin à l'impunité en veillant à ce que les plaintes relatives à des violations des droits humains fassent l'objet d'une enquête et que les auteurs soient tenus responsables après des procès équitables. Depuis 2005, des acteurs de la société civile, des organes de protection des droits de l’Homme des Nations Unies et d'autres acteurs pertinents, se sont succédés pour condamner ces violences mais l'écrasante majorité des allégations crédibles de violations des droits de l'homme, y compris la mort d’enfants et de manifestants n'ont pas donné lieu à des poursuites. On peut citer le cas des enfants Anselme Sinandaré, 12 ans, Douti Sinalengue, 21 ans, Rachad Agrigna, 17 ans, Jojo Zoumekey, 13 ans, Moufidou, 11 ans et la liste n’est pas exhaustive.
Pourtant, les autorités ont, à plusieurs reprises, pris des engagements pour mettre fin à ce cycle de violences et d’impunité. Le Togo est partie de plusieurs conventions internationales relatives aux droits de l’Homme et au plan national, les autorités ont su domestiquer les textes internationaux dans l’ordonnancement juridique notamment le code pénal, la loi sur la liberté de manifestations, la loi organique portant organisation, composition et fonctionnement de la Commission Nationale des Droits de l’Homme (CNDH).
Sur la question de réparation, le gouvernement a mis en place le Haut-commissariat à la Réconciliation et au Renforcement de l’Unité Nationale (HCRRUN) qui a procédé à l’indemnisation des victimes de violences à caractère politique de 1958 à 2005, mais en occultant la restitution, la réadaptation, la satisfaction et les garanties de non- répétition pour les victimes.
Le processus de justice transitionnelle avec le rapport de la CVJR n’a pas abouti à des actions concrètes pour que les victimes obtiennent justice.
La grande majorité des plaintes déposées par les proches des victimes décédées lors des manifestations n’ont pas abouti à des poursuites en justice. Si certains faits spécifiques d’homicides ont conduit à des mesures disciplinaires, ces procédures n’ont pas débouché sur des enquêtes judiciaires ni sur des procès et donc ne sauraient être considérées comme des tentatives légitimes visant à traduire les responsables présumés devant la justice et à proposer des voies de recours aux victimes. Pourtant à l’occasion de la fête traditionnelle de l’igname à Atakpamé, le chef de l’Etat a lancé en 2007 la campagne contre la violence et l’impunité au Togo en déclarant «je tiens à proclamer haut et fort plus jamais ça sur la terre de nos aïeux ».
L’inaction constante des autorités togolaises face aux violations et atteintes aux droits humains est l’une des raisons à l’origine de la spirale de violences qui sévit dans le pays. Ainsi le gouvernement du Togo ne respecte pas son obligation juridique d’enquêter sur les violations du droit international humanitaire et du droit international relatif aux droits humains, de poursuivre les personnes suspectées de tels actes et de sanctionner ceux qui sont reconnus coupables. Ces manquements privent les victimes de leur droit à la vérité, à la justice et aux réparations.
C’est pourquoi, les organisations porteuses de cette initiative demandent aux autorités :
- de prendre toutes les mesures juridiques et pratiques pour veiller à ce que toutes les personnes soupçonnées de crimes fassent l’objet d’une enquête, soient poursuivies et sanctionnées, si elles sont reconnues coupables, devant des juridictions nationales compétentes, impartiales et indépendantes, dans le respect des normes d’équité des procès,
- de rendre publics les modalités et les rapports de toutes les enquêtes conduites par le gouvernement sur les violations des droits de l’homme,
- de veiller à une plus grande transparence et à un accès à la justice par les populations.
Pour ce faire, les organisations porteuses de cette initiative ont décidé de lancer une initiative dénommée « ACTION SOLIDARITE CITOYENNE. N’OUBLIONS PAS LES VICTIMES ».
Cette initiative a pour objectifs :
- Renforcer ou Encourager le débat sur les violations des droits de l’Homme et la lutte contre l’impunité au Togo ;
- Amener les autorités togolaises à prendre des engagements fermes sur le respect des droits de l’Homme et la lutte contre l’impunité ; Susciter plus d’intérêt auprès des autorités sur la question des réparations des préjudices subis par les victimes de torture tout en respectant le principe de séparation des pouvoirs ;
- Obtenir l’appui /le soutien des partenaires du Togo sur le respect des droits de l’Homme et le renforcement de l’Etat de droit.
L’atteinte de ces objectifs permettra de contribuer à la manifestation de la vérité et à l’effectivité de la justice sur les violations des droits de l’Homme et de mener des actions de solidarité en faveur des victimes directes et indirectes.
Pour atteindre ces objectifs les organisations de la société civile membres du groupe entendent s’appuyer sur trois (03) moyens d’actions.
D’abord le groupe entend mener des campagnes de sensibilisation, ensuite mener le plaidoyer et enfin témoigner aux familles des victimes la compassion de la société civile par des actes de solidarité.
Peuple Togolais, notre diversité ethnique et culturelle est une source de richesse qui nous appelle à œuvrer ensemble à un idéal commun, celui d’un Togo uni, en paix et prospère où l’Etat de droit est une réalité. Lutter contre l’impunité est un devoir pour chaque citoyen car la Justice est le socle du vivre ensemble dans toute société. Voilà pourquoi l’initiative Action Solidarité Citoyenne nous concerne tous. Sa réussite dépend de l’implication de chacun quel que soit son statut social.
Action Solidarité Citoyenne est donc une action de chaque Togolais. C’est une action pour interpeller les pouvoirs publics et aussi pour signifier que Nous sommes, au nom de la responsabilité citoyenne, les gardiens de nos frères et sœurs. Chaque togolaise et togolais doit s’approprier cette phrase d’Aimé Césaire : « ma bouche sera la bouche des malheurs qui n’ont point de bouche, ma voix, la liberté de celles qui s’affaissent au cachot du désespoir ».
Fait, à Lomé le 15 juillet 2020-
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