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Togo - Mauvaise gouvernance et assassinats politiques au Togo: le silence, l’hypocrisie et le racisme des représentations occidentales à Lomé

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Mauvaise gouvernance et assassinats politiques au Togo: le silence, l’hypocrisie et le racisme des représentations occidentales à Lomé

"Les États n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts". (Charles De Gaulle).

C’est la recherche de ces intérêts qui avait poussé beaucoup de pays occidentaux à envoyer leurs explorateurs, la plupart du temps, sous forme de missionnaires, vers la fin du 19e siècle vers les côtes africaines. Et tout ça avait donné ce que nous appelerons plus tard la colonisation. Et c’est dans la même logique de recherche de leurs intérêts que les pays dits riches ouvrent des représentations diplomatiques et envoient leurs représentants dans les pays les plus reculés et les plus pauvres de la planète. Ce ne sont pas tous les Allemands, par exemple, qui savent qu’il y a un petit pays quelque part sur la carte du monde qui s’appelle Togo et où leurs autorités politiques ont un représentant avec toute une équipe derrière. L’Allemand de la rue, par exemple, se demande ce que fait l’armée du plus riche pays d’Europe, son pays, dans ce pays pauvre du Sahel qui s’appelle Mali. Les Français peu avisés ne comprennent pas et ne savent même pas que leur pays pratique une certaine exploitation de l’Afrique. Et pourtant, les deux pays clés de l’Union Européenne ont des ambassades à Lomé; des représentations diplomatiques acceptées et respectées à leur juste valeur par les autorités et les populations togolaises.

Il n’est plus un secret pour personne de parler de dictature militaro-clanique terrible quand il s’agit du régime togolais. Et ce ne sont pas les diplomates occidentaux qui nous démentiront. Ils sont plutôt mieux renseignés que nous sur les corollaires de la tyrannie Gnassingbé qui ont pour noms: népotisme au vu et au su de tout le monde, corruption endémique, pillage des richesses du pays érigé en système de gouvernement, violations massives des droits de l’homme faites de disparitions, d’arrestations et d’incarcérations arbitraires d’opposants et surtout d’assassinats politiques, aussi bien dans le monde civil que militaire. C’est ici le lieu de dénoncer le silence, de relever l’hypocrisie de ces fameux diplomates dont les pays d’origine sont prompts à donner des leçons de démocratie et du respect des droits de l’homme au reste du monde. Eux qui sont prêts, chaque jour, à dénoncer le moindre abus des régimes qui leur tiennent tête, comme l’Iran, la Turquie ou la Russie, et dont les dénonciations ne sont pas toujours forcément vérifiées.

Mais quand il s’agit des pays comme le Togo, qui méritent vraiment la désignation de républiques bananières, nos diplomates provenant de ces pays donneurs de leçons, deviennent subitement sourds et aveugles et refusent de voir et de dénoncer tout ce qui se passe chaque jour en termes de violations des droits élémentaires des citoyens. Un pays comme la France, principal prédateur des pays africains surtout francophones, et source de leur permanente dépendance, continue à former des officiers supérieurs de notre pays et à envoyer des agents de l’espionnage français auprès du dictateur, appelés pompeusement instructeurs militaires. Des "instructeurs militaires" et des diplomates qui connaissent jusqu’au dernier détail la configuration tribale de l’armée togolaise, et le nom de tous les officiers au sein de cette armée, régulièrement cités dans les assassinats de citoyens togolais.

Les assassinats d’opposants, les purges régulières au sein des forces armées qui sont monnaie courante depuis des décennies n’émeuvent outre-mesure nos ambassadeurs occidentaux qui restent cloîtrés dans leur tour d’Ivoire comme si de rien n’était. Les hold-up électoraux, l’interdiction faite à l’opposition de manifester, les sièges militaires à Tchaoudjo, Assoli, Tchamba, l’Oti, à Kpalimé et dans plusieurs quartiers de Lomé, les récents assassinats et les morts suspectes d’officiers supérieurs sont des crimes qui devraient susciter la colère et la réaction de représentants de pays qui se veulent propres. Le sacro-saint argument de réserve diplomatique et de non-ingérence dans les affaires intérieures d’autres pays devrait être battu en brèche quand il s’agit de la dignité et de la vie d’êtres humains, quel que soit le pays ou le continent qui les abrite. Les diplomates de la France, de l’Allemagne, du PNUD, de l’Union Européenne, des États-Unis n’ont pas le droit d’être là pour les seuls intérêts des pays ou des institutions qu’ils représentent et fermer les yeux quand les gouvernants de leurs pays de résidence font ce qu’ils veulent des richesses et affament leurs populations; quand le dictateur empêche à chaque élection le vrai vainqueur du scrutin de jouir du pouvoir et se maintient par la force.

Ces ambassadeurs, sans tenir compte de la réalité du terrain que pourtant ils vivent chaque jour que Dieu fait, relaient des mensonges comme paix, stabilité politique, croissance économique. Pour un pays comme le Togo, où le quotidien des citoyens est tout le contraire de tous ces beaux mots, où la terreur militaro-politique est omniprésente, cette façon de faire est plus qu’une insulte; il s’agit d’une négation de la dignité et de la vie des peuples qui sont considérés comme des moins que rien et dont le destin ne compte pas. Et nous n’exagérons pas si nous disons qu’il s’agit de racisme de la part de ceux-là qui sont chez nous, pas pour nos beaux yeux, pas pour notre belle peau d’ébène, mais pour les opportunités économiques qui s’offrent à eux et pour les matières premières à eux bradées par le dictateur. Pourquoi se mettraient-ils alors du côté du peuple pour faire partir le Chef d’État indésiré pour devoir payer demain, avec une gouvernance raisonnable, très cher les produits qu’ils acquièrent aujourd’hui presque gratuitement?

Et s’il advient que le dictateur est chassé du pouvoir par un mouvement populaire ou par un coup d’État, ce sont les mêmes qui condamneront et exigeront un rapide retour à l’ordre constitutionnel; reclameront des élections dans un délai raisonnable, comme si Faure Gnassingbé respectait l’ordre constitutionnel, comme si le dictateur togolais est au pouvoir parce que les Togolais l’ont élu démocratiquement, comme si lors des dernières élections présidentielles en 2005, en 2010, en 2015 et surtout en février 2020 il avait été plébiscité par ses compatriotes.

Si c’est ça la coopération et l’amitié entre les peuples qui expliquent l’échange des diplomates entre deux pays, si c’est ça l’idéal des donneurs de leçon de démocratie et du respect des droits de l’homme, de laisser prospérer des dictateurs pour le malheur de leurs populations en Afrique; alors qu’ailleurs, en Biélorussie par exemple, ils soutiennent ouvertement les manifestants contre le président Lukaschenko dont certains d’entre eux exigent le départ ou la reprise du scrutin, nous disons qu’il y a trop d’hypocrisie, trop de méchanceté, trop de racisme contre des peuples qui, à leurs yeux, ne méritent pas de vivre décemment comme les leurs et doivent demeurés éternellement corvéables à merci. Ce deux-poids-deux-mesures dans les relations internationales, déjà dénoncé ailleurs par des voix plus autorisées, devrait continuer à l’être par des intellectuels togolais et africains pour exiger beaucoup de considération pour les populations africaines. Car une vie humaine à Paris, à Sokodé, à Bamako, à Berlin ou à Djibouti doit avoir la même valeur.

Samari Tchadjobo
06 septembre 2020
Allemagne-

L'AUTEUR
Samari Tchadjobo
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